Fiche : les fonctions syntaxiques en français et en latin
Remarque :
Afin de mettre en oeuvre une continuité entre les enseignements, la majorité des éléments de cette fiche sont issus du cours de 1e année de licence Du français aux langues anciennes.
Fondamental :
Il convient de distinguer nature et fonction d’un mot (ou d’un groupe de mots).
Les mots ont une nature, indépendante de leur emploi. Elle est indiquée dans le dictionnaire.
La fonction d’un mot (ou d'un groupe de mots) est liée à ce qu’on appelle la syntaxe cad à la partie de la grammaire qui étudie les relations entre les mots à l’intérieur d’une phrase, leurs combinaisons, et les règles qui président à ces relations, à ces combinaisons. Etudier la fonction d’un mot, c’est se demander comment il fonctionne dans une phrase ou un fragment de phrase, quel est son rôle dans le processus qui fait que l’énoncé se construit (est correct grammaticalement) et a du sens.
Mots sans fonction
Dans la grammaire traditionnelle, que suivent les grammaires latines et grecques
- le verbe conjugué à un mode personnel est considéré comme le pivot/le noyaud’une proposition. Il n’existe pas de terme pour définir sa fonction.
- les prépositions et les conjonctions (de coordination et de subordination) sont considérées comme des outils grammaticaux. Elles n’ont pas de fonction par elles-mêmes.
Classement des fonctions
On distingue les fonctions par rapport au verbe et les fonctions par rapport au nom. Il convient en effet de retenir qu’une fonction est toujours par rapport à quelque chose : un élément isolé a une nature, il n’a pas de fonction.
I. Les fonctions à l'intérieur du groupe verbal
1. Le sujet du verbe
- approche relevant de la logique : le sujet est ce dont on dit quelque chose ; en grammaire, dire quelque chose de quelque chose s’appelle prédiquer ; on peut donc diviser une proposition en deux :
1) le sujet (qui est le quelque chose dont on dira quelque chose) ;
2) le prédicat, qui est le quelque chose que l’on dit à propos du sujet. Le prédicat comprend généralement un verbe et ses compléments éventuels.
À part quelques exceptions, l'existence d’un sujet est obligatoire.
Attention : en latin et en grec, comme dans certaines langues romanes, le pronom personnel sujet n’est généralement pas exprimé sauf lorsqu’on veut insister.
- approche relevant de la morpho-syntaxe : le sujet est ce qui confère au verbe sa personne, son nombre et parfois son genre (phénomène de l’accord) : si le sujet est pluriel, le verbe sera au pluriel ; si le sujet est à la première personne du singulier, le verbe sera à la première personne du singulier.
Un sujet peut avoir les natures suivantes :
Nom ou Groupe Nominal : Mon frère a passé le brevet de secouriste.
Pronom ou groupe pronominal : Il a passé le brevet de secouriste.
Infinitif ou groupe infinitif : Avoir le brevet de secouriste est très utile.
Proposition subordonnée : Qu’il ait un brevet de secouriste me rassure beaucoup.
2. La complémentation des verbes
Elle dépend de la catégorie ou du type du verbe noyau de la proposition.
Les catégories de verbes en français
Catégorie ou type de verbe | Construction du verbe | Exemple |
Intransitif et non attributif | sans Objet (O) ni attribut (A) | je ris ; tu soupires ; elle grogne |
Transitif direct | avec un O qui est un CO Direct (cad sans préposition) | j’ai acheté des chocolats |
Transitif indirect | avec un O qui est un CO Indirect (cad précédé d'une préposition) | elle a participé au tournoi |
Doublement transitif | avec un COD et un COI (parfois appelé COS) avec deux COI | elle a prêté mille euros à ton frère j’ai parlé de ton projet à mon ami |
Attributif ou d’état[1] | avec un attribut du sujet = A1 (donne une information sur le sujet) avec un attribut du COD = A2 (donne une information sur le COD) | Elle est grande
Il a appelé son chien Romulus. |
[1] En français, la liste principale de ces verbes est : être, paraître, sembler, passer pour, avoir l’air. Cette liste est sensiblement la même en latin.
Attention :
En français comme en latin, certains verbes peuvent être de plusieurs types avec un sens différent. Par exemple :
- elle arrive chez elle/ elle arrive à rattraper toutes les balles (elle réussit à…) ;
- il rit / il rit de toi (il se moque) ; la fortune rit aux audacieux (est favorable à) ;
- il compte les absents (il dénombre) / il compte sur elle (il lui fait confiance).
Les catégories de verbes en latin
Catégorie ou type de verbe | Construction du verbe | Exemple |
Intransitif et non attributif | sans Objet (O) ou avec Objet au datif ou à l'ablatif[1]. sans Attribut (A). | Dormio (je dors). Domino pareo (j'obéis au maître).
|
Transitif | avec un O à l'accusatif | Ancillam uoco (j'appelle la servante). |
A deux Objets | avec deux O (à l'accusatif ou à l'accusatif et à un autre cas). |
Pueros grammaticam doceo (j'enseigne la grammaire aux enfants). |
avec un attribut du sujet = A1 (donne une information sur le sujet) avec un attribut du COD = A2 (donne une information sur le COD) | Magna est (Elle est grande).
Canem suus Romulum appellauit. (Il a appelé son chien Romulus). |
Attention :
[1] En latin,
sont indiqués transitifs uniquement les verbes qui se construisent avec un O à l'accusatif.
sont indiqués comme intransitifs,
les verbes qui ne se construisent pas avec un O
mais aussi les verbes qui se construisent avec un O au datif ou ablatif (qu'on appellerait COI en français).
3. Les compléments circonstanciels
Quel que soit leur type, les verbes peuvent se construire avec un ou des compléments circonstanciels (C ou CC). Dans la plupart des cas on peut supprimer un CC sans que la proposition cesse d’être correcte grammaticalement (on perd juste l’information que donnait le CC).
Les CC sont plus mobiles dans une proposition que les O. Les CC sont traditionnellement classés selon des critères sémantiques dont la liste, plus ou moins longue, varie selon les grammaires :
le CC de temps
le CC de lieu
le CC de manière
le CC de moyen
le CC d’accompagnement
le CC de comparaison
le CC de cause
le CC de conséquence
le CC de but
les CC d’opposition et de concession
le CC de condition
le CC de mesure
Attention :
Les grammaires latines emploient uniquement cette terminologie traditionnelle et notamment pas les notions de compléments essentiels ou inessentiels. Malgré leur caractère obligatoire, elles considèrent les compléments de verbes de mouvement comme des CC.
II. Les fonctions à l'intérieur du groupe nominal
Le groupe nominal (GN) est un groupe de mots qui s’organise autour d’un nom, quelle que soit la fonction de celui-ci.
Le groupe nominal ainsi constitué prend la fonction qu'avait le nom.
Ce qu’on appelle les expansions du nom peuvent être :
- Le déterminant
Une grande maison se dressait sur cette colline
Ma fille a ramené deux petits chats blancs.
Attention : en latin, les articles n’existent pas, toutes les autres catégories de déterminants existent.
- L’adjectif qualificatif épithète
Une grande maison se dressait sur cette colline
Ma fille a ramené deux petits chats blancs.
Lorsqu’il est séparé du nom par une virgule, on parlera d’épithète détachée.
Tout blancs, les petits chats étaient très salissants.
A noter : Un participe peut avoir la même fonction qu’un adjectif qualificatif épithète.
Une grande maison se dressait sur cette colline cultivée.
- L’apposition
Lorsqu’un Nom ou GN sont en position d’épithète détachée on parlera plutôt d’apposition : Untel, président de X, a déclaré…
Donnant un détail d’information sur le sens d’un mot, l’apposition a le plus souvent une valeur d’identification.
- Le complément du nom (CN)
Il s’agit d’un autre nom ou d’un GN donnant une indication sur le nom le plus souvent par l’intermédiaire d’une préposition : L’ordinateur de Mohammed est cassé ; le chant du petit oiseau est charmant ; le bateau à voile file dans le vent.
Une tendance actuelle est de supprimer la préposition dans des compléments du nom tels que l’impôt sécheresse, une assurance incendie, le rayon bricolage.
- La proposition subordonnée relative
Un nom ou un GN peuvent aussi être complétés par une proposition subordonnée relative (l’homme qui est venu m’a parlé) ou une proposition subordonnée conjonctive (la pensée qu’il vienne m’est désagréable).